Le relais de poste de Ruffec

Rappel historique (on peut aussi parcourir cette page).
L'origine de notre poste date de Louis XI. Le 19 juin 1464, ce prince établit sur les principales routes du royaume, des agents, appelés d'abord maîtres tenant les chevaux du roy, plus tard, maîtres de poste, pour faire porter, de relais en relais, les lettres et paquets qui leur seraient remis.

La poste royale ne servit d'abord qu'au roi, à ses ambassadeurs en pays étranger et à ses principaux officiers.
A la fin du seizième siècle, les courriers furent autorisés à prendre les paquets dés particuliers; mais ils n'obtinrent la même latitude pour les lettres qu'en 1622.


A l'époque de l'établissement de la poste, le transport des lettres se faisait à cheval. Plus tard, on y employa des voitures, auxquelles leur construction grossière ne permettait qu'une marche assez lente. En 1793, on importa d'Angleterre des véhicules moins lourds, qui furent appelés malles-poste, et qui faisaient en moyenne deux lieues à l'heure. En même temps, on multiplia le nombre des départs. Enfin, en 1840, on remplaça les malles par des voitures plus légères, nommées briskas, et également d'origine anglaise, qui franchissaient jusqu'à 16 kilomètres à l'heure, et qui n'ont disparu que devant les wagons des chemins de fer.

Au XIXe siècle l
a poste aux chevaux a pour objet de transporter à grande vitesse les personnes et les choses, tant du gouvernement que des particuliers, moyennant, pour ces derniers, un prix fixé par un tarif spécial. Elle opère, au moyen de relais établis de distance en distance et dirigés par des entrepreneurs particuliers, appelés maîtres de poste, qui, nommés par le gouvernement, sont tenus d'entretenir un nombre de chevaux déterminé. La poste aux lettres est exclusivement chargée du transport des lettres et, dans certaines conditions, de celui des journaux périodiques, des articles de librairie, des papiers de commerce ou d'affaires, des épreuves d'imprimerie, des échantillons de marchandises.


1763, la route postale passe par Ruffec

Initialement la route postale ne passait pas par Ruffec. Elle partait de Paris, rejoignait Tours et Poitiers, passait par Chaunay, Sauzé, Montjean et Villiers-le-Roux, Villefagnan, Tusson, Aigre, Gourville, Saint Cybardeaux, Villars, Marange, laissant Angoulême à sa gauche, puis Chateauneuf.

La route postale de Paris en Espagne chez nous...


En août 1763 lorsque l'itinéraire de la route postale fut transféré par les Maisons-Blanches (Limalonges), Ruffec, Les Nègres (Villegats) et Mansle, un relais de Poste tenu par Bouin de Beaupré fut créé place du Piolet à l'angle de la rue du Piolet et de la rue de Verteuil (source : Jean Jonquet).


Lors de sa création en août 1763, le relais de poste de Ruffec (place du Piolet) fut confié à François Bouin (né 1723, dcd ), fils d'autre François Bouin (né 1693), sieur de Beaupré, marié en 1721 à Antoinette Roubel. En 1742, il avait épousé à Mansle, Magdelaine Deleschelle.


En 1774, la route postale ne passe plus par le centre ville mais file tout droit, du Nord au sud, de Paris en Espagne. Il sera établi un nouveau relais de poste, le long de la nouvelle voie, mais il reste à écrire l'histoire de cette mutation.

La Révolution change la donne et sans doute les maîtres de poste
Dans la nuit du 4 août 1789, on abolit tous les privilèges ; ceux des maîtres de poste suivirent ceux de la noblesse et du clergé et la ruine s'abattit sur les relais. En outre, les gages des maîtres de poste créés par un édit de 1713 et leurs indemnités furent supprimés par un décret du 19 juin 1790. Les maîtres de poste, du moins pour la plus grande partie, abandonnèrent alors leurs relais.
Divers essais de réorganisation furent tentés sans grand succès jusqu'à l'accession des messageries à la liberté en l'an VI. Et c'est la loi du 19 frimaire an VII (9 décembre 1798) qui fixa la nouvelle législation de la poste aux chevaux et définit nettement son rôle et son organisation. Mais son article 5 introduisait une exception au monopole des relais concernant les voitures publiques et le transport des dépêches qui était si large qu'il fallut la restreindre. Ce fut fait par la loi du 15-25 ventôse an XIII (6-16 mars 1805). Elle ordonne que tout entrepreneur de voitures publiques et de messageries qui ne se sert pas des chevaux de la poste est tenu, par poste et par cheval attelé à chacune de ses voitures, de verser 25 centimes aux maîtres des relais dont il n'emploie pas les chevaux. Ce principe fut conservé jusqu'à la disparition de la poste aux chevaux en 1873.

Le nouveau relais de poste (Ecole Méningaud sur la RN10) est à la charge de la famille Frère au début du XIXe siècle ; ce ne sont pas forcément cette famille qui a créé ce nouveau relais de poste mais cela semple très plausible. Leur ancêtre était juge sénéchal à Vivonne (noblesse de robe).

Ce nouveau relais de poste se tenait donc immédiatement au sud, là où est installée l'école Méningaud, à la suite de l'Hôtel de la Poste de Thorel.

Du nord au sud... la route arrive tout droit des Maisons-Blanches, traverse le ruisseau Péruse, bifurque à gauche en arrivant à Ruffec pour rejoindre par la rue de Valence (Rue Jean-Jaurès) la rue du Chenais (près du centre-ville), arrive place du Piolet et par la rue de Verteuil descend pour rattrapper la nouvelle route de Paris en Espagne...

Sud de la Place d'Armes.
La route postale empruntait la rue de Valence et à l'arrière de ces magasins sur la droite, par la rue du Chenais parallèle à la Place d'Armes, filait  pour rejoindre la place du Piolet et la rue de Verteuil.

Au fond de cette rue : la Place du Piolet, et derrière l'enfant seul, une grande maison à l'emplacement de l'ancien relais de poste à l'angle formé par la recontre de la rue de Verteuil et de la rue du Piolet.

Le nouveau relais de poste (là où est installée l'école Méningaud sur la RN10) est à la charge de la famille Frère au début du XIXe siècle ; ce ne sont pas forcément cette famille qui a créé ce nouveau relais de poste mais cela semple très plausible. Leur ancêtre était juge sénéchal à Vivonne (noblesse de robe).
Ce nouveau relais de poste précédera l'Hôtel de la Poste de Thorel.

Notes (source : monographie de Taizé-Aizie)
Bouïn Beaupré ou Bouïn de Beaupré (on trouve l’un et l’autre), appartenait à une famille originaire de Ruffec, aujourd’hui éteinte, qui portait: «d’azur au chevron d’or accompagné de deux étoiles de même en chef, et en pointe d’un mouton (alias un chien ou un âne) d’argent passant sur une terrasse d’or».
Dans les registres de Ruffec, on trouve à la date du 12 février 1753, une adjuration publique faite à Ruffec de l’hérésie de Calvin, par un Pierre Bouïn de Beaupré.
Un autre François Bouïn, sieur de Beaupré, fut maître de poste à Ruffec en 1760, il avait épousé Madeleine Deléchelle; vers cette époque, on trouve des Deléchelle à Taizé; peut-être Bouïn Beaupré qui fut greffier de la municipalité en 1790, descendait-il de ce maître de poste.
On trouve aussi un François Bouïn, sieur de Beaupré, de la paroisse de Taizé-Aizie, fils de Jean Bouïn et de Suzanne Jolly, marié le 18 janvier 1762 à Marie-Madeleine Charpentier.

Société archéologique et historique de la Charente - 1947 - Extraits.
"Le 3 décembre 1773 la femme Bouin devenait Maîtresse de Poste à Chaunay. Ignace Bouin s'y fixa le Ier octobre 1775... D'autres Bouin rempliront des fonctions importantes à la Poste aux lettres de Ruffec."


Débouché à droite de la rue de Verteuil (Rue de la République) sur la route nationale ( qui monte sur la gauche).


Voyage dans une partie de la France (Grigorii Vladimirovitch Orlov - 1824)

"J'ai repris la route qui doit me conduire à ma destination, et franchi dejà plusieurs postes, toutes très-bien servies. Arrivant à celle de Maisons-Blanches, je n'y trouve point le nombre de postillons nécessaires pour mes équipages. J'en demande au maître de poste, qui me dit d'être tranquille, et que lui-même va m'en servir. Je regarde cet homme, et je vois s'unir au langage le plus honnête une figure distinguée. J'accepte son offre, on attèle les chevaux, et nous partons. Je suis mené avec la rapidité de l'éclair à la poste voisine (Ruffec).
Là j'aborde mon obligeant conducteur, lui témoigne les doutes que je formais sur sa véritable profession, et lui demande s'il avait toujours fait le même métier. Il me répond avec émotion que ce métier n'a jamais été le sien ; qu'il fut pendant vingt ans officier et capitaine de cavalerie, employé à la défense de son pays, et que couvert de blessures honorables, et rentré dans ses foyers à la paix, sans fortune, et chargé d'une nombreuse famille, il consacre désormais à sa vieille mère, à sa femme et à ses enfants, des forces naguère consacrées à sa patrie.
Je me rappelle alors le champ de bataille que je venais de parcourir, et à tous les torts que je reprochais à la gloire, j'ajoutai celui de laisser, le plus souvent, sans récompense et sans appui, ceux qui se sont dévoués à son culte. J'ai serré vivement la main de ce brave vétéran; je l'ai vu ému, et je crois même avoir aperçu quelques larmes dans ses yeux; mais soudain il me quitte, s'élance sur son cheval, et part pour retourner à sa profession qu'il rend si honorable.
Ruffec est le nom de la petite ville où se trouve la poste que je quitte. Elle est entourée de forges qui contribuent par les plus utiles produits de l'industrie à'l'aisance de ses habitants, dont le nombre ne s'élève pas à plus de 2,000, et située sur un ruisseau qui abonde en excellentes truites.
C'est après avoir franchi son territoire fertile, que j'arrive dans la capitale célèbre de l'Angoumois.
"

Si la route postale passait près du centre-ville dans un premier temps elle s'est  éloignée vers l'ouest quand son tracé fut tiré au cordeau. En effet, la portion entre le carrefour de la rue de Valence et le carrefour de la route de Verteuil ne fut pas creusée vers la fin du XVIIIe siècle (erreur historique), ni recreusée en 1808  pour faciliter le passage des troupes napoléonniennes se rendant guerroyer en Espagne.

Lire bientôt à ce sujet les articles très documentés publiés par l'Observateur de Ruffec publiés dans l'année 1934.


La poste : http://philippepoisson-hotmail.com.over-blog.com

Le 20 août 1760 (d'autres textes disent juillet 1760), le conseil d'administration de la ferme des postes autorise le changement de la route au cours de sa séance du 20 août.

Sur l'impulsion de Turgot (ce qui est faux), afin de desservir Ruffec et surtout Angoulême, la route royale venant de Poitiers, Vivonne puis Chaunay, - déjà retracée - par Ruffec, Mansle et Angoulême (port de l'Houmeau), puis Barbezieux pour aller à Bordeaux.


Nous supposons qu'une ligne de poste allait desservir Aigre et une autre Villefagnan à partir de Ruffec en direction de Chef-Boutonne, avec un relais à la Faye, Villefagnan (Etoile d'Or), Embourie, Theil-Rabier, etc. C'était le rôle des courriers à pied appelés "savattes"... (Anciennement, dans le service de la poste, celui qui va à pied porter les lettres dans les endroits éloignés des grandes routes ; on dit aujourd'hui piéton.
)

La Route nationale n'a pas été creusée ou recreusée en 1808 lors des guerres d'Espagne, mais à la fin du XVIIIe siècle (liire le chapitre concernant la traversée de Ruffec) : on peut mesurer la hauteur concernée en observant celle des jardins jouxtant l'école Méningaud ou après l'Hôtel de France. Ce dernier fut établi après 1820.

Le nouveau relais de poste de Ruffec était composé d'une maison d'habitation, d'écuries et jardin, et de bâtiments de servitude. Cette propriété formait l'angle de la route nationale avec la route de Villefagnan. Ses propriétaires la vendront en 1896 à la ville pour y établir une école. Elle jouxte l'hôtel Thorel.
 
Ce ne sont pas forcément les Frère qui ont créé ce relais de poste. Leur ancêtre était juge sénéchal à Vivonne (noblesse de robe). Antoine Isaac (ou François Isaac) Frère est né 14 mars 1758 à Vivonne, il est le fils de Louis Alexandre Frère de Villeneuve, sénéchal de cette terre (Vivonne), et de Jeanne Eléonore de Lauzon. Antoine Isaac (ou François Isaac) Frère est décédé le 15 septembre 1787 à 29 ans à Poitiers Sainte-Radegonde (86), marié le 25 janvier 1779 à Melle (79) avec Louise Catherine Auguis (décédée le 06 mars 1785 à Poitiers (86)) ; ils eurent : Jacques Antoine Frère né le 29 décembre 1779 à Vivonne (86) et décédé le 27 janvier 1831 à Ruffec 19, (maire élu en 1815 pendant les Cent Jours, propriétaire et conseiller municipal à Ruffec en 1831), marié le 24 septembre 1805 à Ruffec (16), avec Jeanne Lucille Geoffroy, née le 1er août 1784 et décédée le 27 septembre 1865 à Ruffec (16) ; ils eurent : Jacques André Hyppolite Frère né le 9 octobre 1806 et décédé le 15 mars 1877 à Ruffec 16, marié le 2 mars 1835 à Ruffec (16) avec Jeanne Lucile Françoise Aloïse Garnier de Laboissière, née le 10 septembre 1811 à Ruffec (16) et décédée le 28 mars 1847 à Ruffec (16). Ils eurent une fille Marie Louise Elisabeth née le 27 novembre 1836 et décédée le 8 avril 1847 à Ruffec ; et un fils Jean Gustave Frère né le 3 avril 1840 à Ruffec, marié le 11 février 1874 à Poitiers (86) avec Marie Julie Gabrielle Sachet née le 28 décembre 1849 à Poitiers (86).

Les Frère sont installés à Ruffec depuis au moins 1806. Ils ont découvert un nouveau métier et vivront "noblement" tout au long de leur séjour sur le bord de la route royale, impériale, nationale.

- En 1841, sur la liste de recensement figurent Jeanne Geoffroy (57 ans), veuve Frère, et propriétaire ; Jean Gustave Frère son fils, propriétaire ; André Hippolyte Frère (33 ans) second fils et maître de poste, époux de Louise Garnier de la Boissière (27 ans) ; leur fille Louise (4 ans) et leur fils Jean Gustave (1 an). Avec eux, deux femmes domestiques. On retrouve dans les parages des postillons résidant en famille ou logés chez des particuliers. 

- En 1846 on retrouve les mêmes sauf Jean Gustave Frère le fils aîné ; avec eux, trois femmes domestiques. En 1846, du nouveau aussi puisque l'on découvre que Marie-Anne Lefeuvre (femme Boutruche) est la directrice de la poste aux lettres.

- En 1851, Lucille Geoffroy veuve Frère (prénom et âge imprécis sur la liste) a 63 ans et est dite propriétaire. André Hippolyte Frère (44 ans) est dit aussi propriétaire. (Jean) Gustave Frère a 11 ans. Deux domestiques femmes sont au service de la famille Frère. Mais on ne parle plus de la fonction de maître de poste à cause du chemin de fer. Des entrepreneurs de travaux de chemins de fer se sont installés dans cette rue. 

- En 1866, figurent André Hippolyte Frère (57 ans) qui est dit rentier ; Jeanne Geoffroy (76 ans), veuve Frère, sa mère ; Jean frère, boiteux et fils d'Hippolyte. Trois domestiques, deux femmes et un homme sont au service de la famille Frère.

- En 1876, André Frère (70 ans) est propriétaire. Avec lui Gustave Frère (36 ans) chef de ménage, avec sa femme Marie Sachet (26 ans) née à Poitiers, et 5 domestiques. En 1881, Gustave Frère, propriétaire, est installé dans cette maison avec sa femme et ses deux filles. En 1886, Gustave Frère (46 ans, il en avait 11 en 1851), propriétaire, avec sa femme Gabrielle Sachet (36 ans) et leurs enfants René, Marie, André et 3 domestiques. Cette famille est présente à Ruffec en 1896.


En 1896, une promesse de vente est signée entre la ville de Ruffec et Gustave Frère le propriétaire. A la rentrée 1901 après moult difficultés, cette école ouvre ses portes avec un pensionnat en tant qu'école de garçons doublé d'une école supérieure de garçons. Cette école est devenue l'école Méningaud.
  • Nota : en 1804, Ruffec a une sous-préfecture , un tribunal de première instance, un conservateur des hypothèques, un receveur particulier et une brigade de la gendarmerie à cheval. Sa population était de 1937 habitants. La ville disposait d'un bureau de poste et d'un relais de poste aux chevaux.
(4) Source : Jean-Louis Carde, apparenté aux Pinet et Thorel.

Ci-dessous : la route postale en 1828

La poste aux lettres par Angoulême
A Angoulême, chef-lieu du département de la Charente se situait le 38e relais de poste à 117 lieues et demie de la capitale.
Selon François Joseph Grille, qui a écrit «l’itinéraire de Paris à Bordeaux, Tours, Poitiers, Angoulême» publié en 1830, la ville est sur une hauteur au pied de laquelle la Charente et l'Anguiaine réunissent leurs eaux. Elle s'élève en terrasse sur le monticule et forme un cône aplati qui ne laisse pas de présenter au dehors un aspect assez pittoresque.
Quand on est dedans on est moins flatté de cette disposition du terrain, qui fait des rues difficiles et des quartiers malaisés à exploiter.
Avec de l'art on remédie à tout ; et dans quelques siècles, par les rampes que nos ingénieurs peuvent établir, et des tournants mieux ménagés que ne le faisaient nos pères, Angoulême sera plus commode à parcourir, et permettra même aux diligences de s'élever jusqu'à son sommet. Dans l'état actuel des choses, elles restent dans le faubourg de l'Houmeau (rive de la Charente).
C'est le quartier marchand, celui du roulage et des expéditions par terre et par eau. C'est là que sont les auberges, la poste aux chevaux, les dépôts et les grands magasins de vins, d'eau-de-vie , de sel, de grains.
Pour monter dans les hauts quartiers, il faut payer un quart de poste, quand on voyage dans sa voiture.
Allez à pied, croyez-moi, c'est la seule manière de bien voir, de tout voir. On cause à droite, à gauche. On questionne, on interroge... Il y a des gens qui s'imaginent que vous vous moquez d'eux. Comme ils connaissent très bien leur endroit, ils pensent en eux-mêmes que vous devez le connaître aussi, et ils prennent pour une raillerie ce qui est l'effet d'une nécessité ou d'une politesse. Ayez patience, persévérez, c'est, quand on voyage, le seul moyen d'arriver et d'apprendre.
Il y a ici des fabriques de faïence, des filatures de laine , des tanneries, et surtout des fabriques de papier qui sont au loin fort renommées.
Quand je dis que les fabriques sont ici, je veux faire entendre leurs dépôts, car les moulins et les ateliers sont dans les environs, sur tous les cours d'eau qui tombent dans la Charente. Nous aurons occasion bientôt d'en citer un assez grand nombre, en passant sur la route d'Angoulême à Barbezieux.
Le safran est cultivé en grand dans les champs de l'arrondissement d'Angoulême.
Le gibier est abondant et sa chair très-goûtée dans ces contrées. On en fait des pâtés, qu'on met dans des terrines et qu'on envoie au loin, bien apprêtés et bien truffés, pour la satisfaction des amateurs.
Un bon livre quand on est en route c'est l’Almanach des Gourmands, et, si l'on veut encore, l'ouvrage de Le Grand-d'Aussi sur l'ancienne cuisine des Français. On sait ce que chaque pays a de meilleur, et de cette manière on peut se régaler à toutes les tables d'hôtes de ce qu'il y a de plus fin et de plus recherché dans les villes diverses que l'on rencontre.
Un bon dîner n'est jamais de trop dans les courses longues d'une vie si courte Un bon dîner fait passer par-dessus bien des ennuis, et même quand vous sourit la fortune, il ajoute à son piquant et trompe la monotonie du bonheur.
Les promenades d'Angoulême sont délicieuses par les ombrages et par les points de vue.
Les bains sont bien soignés, et c'est une excellente chose qu'un bain pris en sortant de voiture et avant de se mettre à table. Le bain est une sorte de panacée pour une foule de maux qui ne tiennent qu'à des échauffements et des engourdissements. Notre pauvre vie sociale est si mal organisée et nous faisons si peu usage de nos bras et de nos jambes que si nous n'y prenions garde ils finiraient par se paralyser avant l'âge. Le bain leur rend la souplesse désirable et il redonne au sang ce calme sans lequel il n'y a que malaise et que dangers. Voilà votre faiseur d'itinéraires qui se transforme en docteur de la faculté.
Angoulême a une bibliothèque de 10.000 volumes ; un collège pour les humanités ; un collège royal de marine, dont le gouverneur est M. Gallard de Terraube, et qui semblerait mieux placé à La Rochelle ou à Rochefort. Veut-on faire des marins d'eau douce ? Non sans doute. Eh bien ! mettez donc ces jeunes gens sur les bords du grand océan, en face des vagues écumantes…
Des routes partent d'Angoulême dans toutes les directions : pour Limoges, à l'est; pour Poitiers, au nord ; pour Périgueux et pour Bordeaux, au sud ; pour La Rochelle, à l'ouest, par Saint-Jean-d’Angély, ou encore par Jarnac, Cognac, Rochefort et Saintes…


Utilité et histoire de la poste. (1890)
1. L'origine de notre administration actuelle des postes date de Louis XI. Le 19 juin 1464, ce prince, adoptant un système de transport organisé, depuis 1296, par l'Université de Paris, pour faciliter les rapports de ses élèves avec leurs parents, établit sur les principales routes du royaume, des agents, appelés d'abord maîtres tenant les chevaux du roy, plus tard, maîtres de poste, pour faire porter, de relais en relais, les lettres et paquets qui leur seraient remis.
2. De même que chez les anciens, la poste royale comme on l'appelait, ne servit d'abord qu'au roi, à ses ambassadeurs en pays étranger et à ses principaux officiers. A la fin du seizième siècle, les courriers furent autorisés à prendre les paquets dés particuliers; mais ils n'obtinrent la même latitude pour les lettres qu'en 1622, sous l'administration de M. d'Almeiras, directeur général ou, comme on disait, contrôleur général des Postes.
Cette grande réforme fut complétée le 26 octobre 1627, par la publication du premier tarif régulier des lettres, dont la taxation avait été jusqu'alors presque entièrement laissée à l'arbitraire des commis. Enfin, en 1629, on adopta un tarif semblable pour le transport des articles d'argent, en même temps qu'on organisa l'exemption de la taxe pour les hauts fonctionnaires, ce qu'on a nommé depuis la franchise postale. Dès ce moment, la poste devint réellement et pour toujours un service public dont l'importance s'accrut d'année en année.
(Suite.)
1. A l'époque de l'établissement de la poste, le transport des lettres se faisait à cheval. Plus tard, on y employa des voitures, auxquelles leur construction grossière ne permettait qu'une marche assez lente. En 1793, on importa d'Angleterre des véhicules moins lourds, qui furent appelés malles-poste, et qui faisaient en moyenne deux lieues à l'heure. En même temps, on multiplia le nombre des départs. Enfin, en 1840, on remplaça les malles par des voitures plus légères, nommées briskas, et également d'origine anglaise, qui franchissaient jusqu'à 16 kilomètres à l'heure, et qui n'ont disparu que devant les wagons des chemins de fer.
2. Jusqu'en 1889, toutes les communes rurales furent sans relations directes avec la poste. Pour retirer les lettres, les habitants des campagnes étaient obligés de se rendre au chef-lieu de canton, souvent même au chef-lieu d'arrondissement. Ce grand inconvénient commença à disparaître dans le courant de cette année, où une loi spéciale établit le service ou factage rural.
3. Remarquons, en passant, que, pendant des siècles, les villes communiquaient entre elles et avec l'étranger, mais ne pouvaient pas communiquer avec elles-mêmes, c'est-à-dire que la poste ne se chargeait pas des lettres envoyées d'un quartier d'une ville dans un autre quartier de la même ville. En France, ce progrès fut réalisé, pour la première fois, à Paris, en 1760, par Pierron de Chamousset, conseiller à la Cour des comptes, qui prit pour modèle une institution analogue fondée à Londres, en 1680, par un nommé Dockwar. Alors exista ce qu'on appela d'abord la poste à un sou, puis la poste à deux sous, et qu'on appelle aujourd'hui la petite poste.
(Suite.)
1. Actuellement, l'administration française des postes se divise en deux branches distinctes : la poste aux chevaux et la poste aux lettres.
2. La poste aux chevaux a pour objet de transporter à grande vitesse les personnes et les choses, tant du gouvernement que des particuliers, moyennant, pour ces derniers, un prix fixé par un tarif spécial. Elle opère, au moyen de relais établis de distance en distance et dirigés par des entrepreneurs particuliers, appelés maîtres de poste, qui, nommés par le gouvernement, sont tenus d'entretenir un nombre de chevaux déterminé. Ce service, très important autrefois, a disparu sur toutes les lignes où il existe des chemins de fer.
3. La poste aux lettres est exclusivement chargée du transport des lettres et, dans certaines conditions, de celui des journaux périodiques, des articles de librairie, des papiers de commerce ou d'affaires, des épreuves d'imprimerie, des échantillons de marchandises. Elle se charge aussi du transport de l'argent, des bijoux et autres objets précieux. Pour opérer ses transports, elle emploie, suivant les cas, la poste aux chevaux, des entreprises à pied, à cheval ou en voiture, les chemins de fer, les navires du commerce ou des navires particuliers. Anciennement, elle avait des tarifs qui variaient avec les distances. Aujourd'hui, il n'existe qu'un seul tarif pour toutes les lettres qui ont la même destination, et le même poids. Cette réforme capitale, qui existait déjà en Angleterre, dès février 1840, a été introduite en France par une loi du 24 août 1848. Nous devons aussi à cette loi l'usage des timbres-poste, que les Anglais possédaient depuis 1839, et dont la première idée, émise à Paris en 1653 et reprise en Suède en 1823, n'avait pu, à aucune de ces époques, être réalisée pratiquement. Enfin, une loi du 20 décembre 1872 a établi la correspondance au moyen des cartes-postales.



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