La saucisse sèche des Charentes en berne
Quel dommage qu'un produit aussi succulent se raréfie à la vitesse d'une cochon au galop ! Quel produit ? Mais la saucisse sèche des deux Charentes ! N'est-il pas ?
Les bonnes maisons savaient les fabriquer lorsqu'elles tuaient le cochon ! Rien de bien compliqué. De la chair à saucisses hachée pas trop fine, du sel, du poivre, du vin blanc, du cognac et... de l'échalote. Après... chacun ajoutait éventuellement ses herbes secrètes.
L'objet du délit menacé de disparition faute de SPS.
SPS : société protectrice des saucisses sèches des Charentes...
Deux tailles : la première (ci-dessus) identique à celle des saucisses de Toulouse comme on en déniche avec bonheur parfois dans le cassoulet authentique et sur place dans les environs de la « ville rose » ; la seconde de la taille d'un saucisson. Deux emplois : la première pouvait se déguster sèche. Attention toutefois à ne pas hâter le séchage. A noter qu'on ne fabriquait pas de saucisses sèches en période chaude car l'échalote « échauderait ». Le saucisson qui ne parvenait jamais à sécher complètement - vu sa taille - était coupé en tranches épaisses et fricassé. Pour être avalé avec des « mogettes piates » réchauffées dans un pot de terre, de préférence devant le feu de la cheminée. Cuisine rapide des soirs de gros travaux ! Mais quel mets succulent sachant que l'huile de cuisson et le gras fondu dans la poêle étaient versés sur les mogettes.
Peu d'adresses à confier pour dénicher ces terribles saucisses dont la capitale locale était une charcuterie (aujourd'hui disparue) à Néré (17). Les deux bouchers-charcutiers de Villefagnan en fabriquaient encore vers 2008. Une tentative de confrérie avait été lancée mais la géniale idiotie d'un nouvel élu, et de sa bande, ont fait capoter ce succulent projet.
Alors, un secret doit vous être confié : j'en déniche encore à Néré chez le boucher-charcutier au carrefour du centre-ville. Et à Ruffec (16), car le patron de la charcuterie « Le cochon rose » qui fait un excellent farci de Charente-Maritime (avec de la viande et en terrine) a conservé l'habitude de faire de telles saucisses : il a appris son métier chez le boucher-charcutier (disparu) de Néré. Et je pense que Philippe Herbreteau patron de la boucherie-charcuterie de Villefagnan (16), ne se ferait pas trop tirer l'oreille pour en fabriquer.
Quant au prix, quitte à démentir la réputation de nos bouchers-charcutiers "qui n'attachent pas leur chien avec des saucisses", je peux dire qu'il est très honnête !
Nota : si quelqu'un sait m'indiquer d'autres adresses, ne pas hésiter à me les communiquer. Merci.
Aujourd'hui il faut nous mobiliser pour remettre en selle cette saucisse exceptionnelle. C'est un excellent produit local qui doit être absolument sauvé. Et faire la Une des journaux aux prochaines « Gastronomades d'Angoulême ».
Appel solennel aux cuisiniers professionnels et amateurs, appel solennel aux responsables du tourisme ! Et qu'on ne vienne pas me dire que la Charente manque de ressources : c'est désespérant de constater l'ignorance gastronome historique des personnes en charge de promouvoir la Charente... L'histoire a bornoncieu ! C'est dit ! Et si je raconte des blagues, qu'on m'attache avec des saucisses sèches !
A quand une confrérie de la saucisse des Charentes les gars ?
Une recette très maison
Fin de cuisson ! Surveiller ses arrières, gare au péché de gourmandise...
Chez nous on fait comme ça ! On achète des « mogettes piates » demi-sèches (congelées au besoin, c'est aussi bon). On les cuit normalement, enfin pas tout à fait. On fait fricasser des saucisses demi-sèches. On fait cuire des morceaux du lard salé (poitrine entrelardée) ou fumée (c'est bien également d'autant que le lard salé est difficile - lui-aussi - à dénicher).
Le lard est parfaitement cuit (ici c'était du lard fumé).
Puis on réunit les mogettes, les saucisses et le lard dans un plat en terre cuite pour les mettre au four à mijoter ensemble. En fin de cuisson, le dessus du plat est gratiné : du vrai cassoulet de Charente.
Voilà cette fameuse saucisse cuisson achevée.
Attention à tenir éloignés vos convives : par l'odeur alléchés ils ne tarderont pas à envahir votre cuisine pour dévorer votre plat préféré.
Avec un verre de vin et une tranche de pain de 3. Coume autefé !